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Moïra je chante juste ton nom

Publié le par Cavalier

I had a dream, l'esprit vacant, en vacance, j'ai voyagé dans l'espace, j'ai voyagé dans le temps. Dans la Bretagne jolie des années 90 toute teintée du monde des fées et des légendes.
 
Une  rencontre, dans les landes, dans les ajoncs, dans les Monts d’Arrée, après un moment de terreur, sans nos voitures perdues, on s'est pris la main, elle s’appelle Moïra. Elle me plaît. Nous échangeons juste quelques mots. Moïra et moi, comme tous les Bretons nous aimons la musique. Mais nous avons chacun la nôtre. Autre. Tout autre.
 
Nous discutons. En frottant leurs cordes sur nos pensées, sa harpe irlandaise et son hurdy gurdy  – sa viole à roue de choriste - font connaissance avec ma voix métal et ma guitare électrique. Que de différences. Alors, après, nous ne parlons plus. Juste les yeux qui se mélangent. Qui se comprennent. Là, tout au fond des buissons  redevenus silencieux.
 
Et je veux la revoir. J’en ai besoin. Elle aussi. Demain, avec son groupe de chanteurs folkloriques - venu se produire au festival de la harpe -, elle ira visiter la  Montagne. Je serai là, le soir. Près du Château. À la cascade, près des hautes falaises...
 
Le lendemain, le car se pose aux rives des douves. La formation de Moïra visitera la Montagne et les ruines, puis rejoindra le port à cinquante kilomètres de là. Je suis venu en voiture. Après l’avoir rencontrée, je ramènerai ma princesse au ferry avec mon carrosse.
 
Puis nous marchons ensemble sur la lande. Un océan sépare nos musiques, et des bémols concourent au droit de nos nuances. Alors que moi j’improvise toujours, elle chante en partitions. Nous sommes un petit groupe de déjantés, eux forment un bel ensemble vocal, mesuré. Retenu en silences. Nous tournons nos cheveux longs en hurlant, et eux ont l’air empruntés, pincés. Les dièses en synérèse. Nos musiques sont branchées, la leur racontent le moyen-âge. Portée du temps qui passe. 

Et quand notre public exulte, le leur reste bien sage. En bécarres de bon ton.

Puis tout à coup, quel vacarme épouvantable ! Nous nous barricadons rapidement dans les ruines  du château. Et au bruit des oiseaux de mer, et au son d’une viole, nous entendons le Grand Druide, accompagné de ses Elfes, qui vient à notre secours. Est-ce la pluie ? En hallebardes. Est-ce l’orage ? Qui gronde sur l'océan déchaînée. Je n’ai jamais rien entendu de tel. Roulement de gros tambours, jeux des guitares métalliques, mêlés aux basses, aux brames, syncopés, chaloupés. Graves, aigus. Aigus, graves. La batterie rebondit, roule, grave les murs, les cymbales, ça tape, ça retape et retape… comme le tonnerre tonnant au lointain.
 
Puis le silence. Tout semble se calmer, et nous distinguons un chant ancien qui dure quelques secondes, et qui monte. Des murmures, puis des cris de guerre, en chœur. Les gros tambours encore, les grosses caisses, les guitares démoniaques. Les bourdons qui bourdonnent. Et les chants. Et comme des sifflements de poudres magiques jetées dans de grands feux.
 
Sur le chemin de ronde, au travers des meurtrières, nous distinguons des cheveux roux qui tournoient aux sons des binious et de la viole. L'O'brien à l’écart, près des feux, fait le signe des fées. Et toujours en surface, la mélodie millénaire, accompagnée au hurdy gurdy, surnage, surfe sur les hordes, au-dessus des bandes de guerriers.
 
Alors des sons de flûtes se répondent au travers de la complainte des roseaux dans le vent. Le temps avance, recule, tant et tant, l’espace se zoome se dézoome et s’enfuit. Des trios de flûtistes se font face dans la brume, ennemis synchronisés, se courbant en jouant, passant d’un pied sur l’autre, en cadence,balançant le torse. Sous leur chevelure tombant sur leurs yeux, hippique, épique, ésotérique.

Des menhirs pointent et sortent de terre. Le tempo du tambour se fait lent. Tous bataillent, tous jouent, tous chantent, en même temps. Le Grand Druide et ses Elfes accordés d’arcs et d’arbalètes. L’O’brien et ses fées, métalliques, aux piques et à l’épée. Seul le bec en calame d’une flûte, reprenant la douce mélodie, émerge enfin de la mêlée.
 
Je serre Moïra dans mes bras. Nous nous embrassons. Tendrement. Nous tremblons. Nous nous trouvons enfin. Nous dégageons une force qui amplifie les sons autour. Ce ne sont pas des instruments ni des chants humains. Mais nous les traduisons, nous les filtrons, les moyennons, les absorbons, chacun à notre manière. Métal et corde. Corde et métal, à mille voix. Ensemble. Et puis enfin  le silence. Vraiment.
 
Synchronisation des sons, concordance des mesures, osmose des instruments, de nous  en mille rendez-vous d'instants.  Nous revivons. Nous renaissons.
 
Sages au-delà de la sagesse, de notre savoir, nous savons précisément ce que nous ne savons plus.
 
C’est ainsi qu’en cette soirée magique est né le premier groupe celte-métal et une chanson en son sein :  Moïra,  je chante juste  ton nom ...
 
 
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N
Ton texte est envoûtant et ô combien j'aurais aimé venir dans cette lande, écouter ces chants, ces sons de flûtes. Le ton est donné par cette harpe irlandaise. Un grand merci pour ce merveilleux moment.
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C
ho merci Nell<br /> un bien joli commentaire<br /> que je savoure<br />